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(IPv6 : un passage obligé)
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La technologie de l'infrastructure de communication retrouve sa simplicité originelle. Il n'est pas soutenable que la croissance du réseau s'effectue avec une complexité croissante comme avec IPv4. Tout ceci est bien connu et cette évolution est qualifiée par "non passage au facteur d'échelle" (''not scalable''). Ainsi, avec cette simplicité retrouvée, de nouveaux champs d'application s'ouvrent à l'Internet en IPv6. Le [RFC 7368] en donne une illustration avec la domotique.  
 
La technologie de l'infrastructure de communication retrouve sa simplicité originelle. Il n'est pas soutenable que la croissance du réseau s'effectue avec une complexité croissante comme avec IPv4. Tout ceci est bien connu et cette évolution est qualifiée par "non passage au facteur d'échelle" (''not scalable''). Ainsi, avec cette simplicité retrouvée, de nouveaux champs d'application s'ouvrent à l'Internet en IPv6. Le [RFC 7368] en donne une illustration avec la domotique.  
  
En plus de la simplicité retrouvée, IPv6 apporte de nouvelles fonctionnalités, comme la configuration automatique d'un réseau. Ainsi, en IPv4, chaque équipement doit se voir attribuer une adresse et obtenir sa configuration depuis un serveur qui reste à gérer. Au contraire, avec IPv6, le réseau peut se gérer uniquement au niveau des routeurs, les stations construisant leurs adresses automatiquement. Ce qui est très  intéressant lorsque le réseau comporte un grand parc de machines,  
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En plus de la simplicité retrouvée, IPv6 apporte de nouvelles fonctionnalités, comme la configuration automatique d'un réseau. En IPv4, chaque équipement doit se voir attribuer une adresse et obtenir sa configuration depuis un serveur qui reste à gérer. Avec IPv6, le réseau peut se gérer uniquement au niveau des routeurs, les stations construisant leurs adresses automatiquement. Ce qui est très  intéressant lorsque le réseau comporte un grand parc de machines.  
  
  

Revision as of 18:17, 25 February 2022


TODO: Reprendre les paragraphes IPv6 de MOOC:Compagnon_Act03 et des éléments historiques de La_standardisation_d'IPv6

Activité 04 : Pourquoi IPv6 ?

Motivations

Le problème de pénurie des adresses Internet est principalement dû à l'explosion de la demande qui dépasse largement la capacité d'adressage IPv4. Ce problème qui est devenu critique ces dernières années, milite pour l’adoption rapide d’IPv6. En effet, il faut aujourd'hui un grand espace d'adressage pour adresser tous les appareils connectés et par la suite, les futurs objets connectés issus des applications IoT. Dépasser la pénurie d'adresses, c'est aussi ouvrir la voie à de nouveaux services, à de nouveaux acteurs innovants, c'est créer de nouveaux marchés pour de nouveaux besoins. Le passage à IPv6 devient une nécessité car, en attribuant une adresse à chaque nœud du réseau, la connectivité en IPv6 retrouve les principes qui ont fait le succès du fonctionnement de l'Internet.

La technologie de l'infrastructure de communication retrouve sa simplicité originelle. Il n'est pas soutenable que la croissance du réseau s'effectue avec une complexité croissante comme avec IPv4. Tout ceci est bien connu et cette évolution est qualifiée par "non passage au facteur d'échelle" (not scalable). Ainsi, avec cette simplicité retrouvée, de nouveaux champs d'application s'ouvrent à l'Internet en IPv6. Le [RFC 7368] en donne une illustration avec la domotique.

En plus de la simplicité retrouvée, IPv6 apporte de nouvelles fonctionnalités, comme la configuration automatique d'un réseau. En IPv4, chaque équipement doit se voir attribuer une adresse et obtenir sa configuration depuis un serveur qui reste à gérer. Avec IPv6, le réseau peut se gérer uniquement au niveau des routeurs, les stations construisant leurs adresses automatiquement. Ce qui est très intéressant lorsque le réseau comporte un grand parc de machines.


Nous allons introduire les points clés de la nouvelle version du protocole d'interconnexion IP : le protocole IPv6. Nous expliquerons pourquoi il y a beaucoup plus d'adresses et comment le protocole IP a été simplifié et modernisé. Les deux protocoles étant différents, le passage d'IPv4 à IPv6 a fait l'objet de scénarios spécifiés dans des RFC. Un grand nombre d'équipements et de services reposent toujours sur IPv4 et une cohabitation s'est installée pour encore de nombreuses années. Néanmoins, IPv6 est un passage obligé pour l'Internet du 21e siècle.

IPv6 : une nouvelle version d'IP

Depuis le premier RFC sur IPv6 publié en décembre 1995, la version IPv6 a quitté les laboratoires. L'étape de standardisation des protocoles de base de IPv6 (core specs) est achevée depuis le début des années 2000. La nouvelle version d'IP reprend ses principes fondateurs : encapsulation des données dans des paquets, adresses source et destination dans l'en-tête, transfert en mode datagramme, routage paquet par paquet.

Le réseau utilise des équipements intermédiaires simples et transparentes aux données transférées. Il n'effectue aucune reprise sur erreurs et tout le contrôle est reporté sur les extrémités dans d'autres protocoles. L'adressage est toujours hiérarchique mais de nouveaux niveaux sont ajoutés à la demande.

Deux points clés permettent à IPv6 de résoudre les problèmes que nous avons évoqués dans les activités précédentes :

  • IPv6 offre une adresse plus longue qui passe de 32 bits à 128 bits. Cette capacité immense va résoudre la pénurie à très long terme ;
  • les concepteurs d'IPv6 ont voulu moderniser le protocole par la même occasion pour prendre en compte de nouveaux besoins qui n'avaient pas été envisagés dans les années 70-80.

Par exemple, il n'avait pas été imaginé le développement de la diffusion de chaînes de télévision sur Internet. Dans IPv6, la diffusion à un groupe de récepteurs, le multicast, a été défini dès le départ.

Un système d'adressage avec une capacité immense

L'espace d'adressage IPv6 a une capacité immense. Une adresse IPv6 est longue de 128 bits (16 octets), contre 32 bits pour IPv4. On dispose ainsi d'environ 3,4 × 1038 adresses (soit plus de 340 sextillions). Pour reprendre l'image usuelle, on aurait plus de 667 millions d'adresses IPv6 par millimètre carré de surface terrestre.

La notation d'une adresse IPv6 se fait maintenant en hexadécimal, codé sur 16 bits. Une adresse IPv6 est alors représenté par 8 mots de 2 octets séparés par un ":", comme le montre l'exemple de la figure 2.

Figure 2 : Exemple d'adresse IPv6 notée en héxadécimal.

Le format de l'adresse est hiérarchique avec de multiples niveaux. L'opérateur dispose d'un bloc d'adresses plus long qui lui donne plus de liberté pour allouer des sous-blocs. On peut découper par exemple l'adresse en 4 champs qui sont :

  • le préfixe FAI ;
  • le préfixe de réseau ;
  • le préfixe de sous-réseau ;
  • et l'adresse hôte.
Figure 2 : Format de l'adresse IPv6.


En IPv6, l'auto-configuration d'adresse permet à un hôte d'utiliser son adresse physique ou MAC pour créer son adresse réseau. Pour réaliser la transition en douceur, il est aussi possible de dériver l'adresse IPv6 de l'adresse IPv4. De nouvelles fonctionnalités définissent des adresses génériques pour, par exemple, trouver immédiatement le serveur DNS sur un réseau, ou n'importe quel autre service.

Une simplification des fonctions d’IP

La conception d'IPv6 est aussi l'occasion de dépoussiérer le protocole. Fort de l'expérience acquise avec IPv4, certaines fonctions d'IP on été redéfinies et optimisées, d'autres ont été supprimées.

Ainsi, la protection des erreurs du paquet IPv4 par un checksum est finalement inutile puisque déjà réalisée au niveau liaison ; le champ checksum n'est plus présent dans l'en-tête IPv6.

La fonction de fragmentation d’un paquet par le routeur a été elle aussi supprimée. Cette fonction a pour but d’adapter la taille du paquet à celle de la trame du réseau suivant. Cela signifie que lorsque le routeur veut envoyer un paquet qui est plus grand que la taille de la trame, il doit fragmenter ce paquet et ainsi l’envoyer dans plusieurs trames consécutives. Les différents fragments sont identifiés pour permettre en réception de reconstituer le paquet initial. La fragmentation a de multiples inconvénients qui sont l’accroissement du temps de traitement du paquet par le routeur, une probabilité plus importante de perte de paquets puisque un seul frgment perdu entraîne la perte de tout le paquet et enfin, en réception, la mémorisation des fragments, leur éventuel remise en ordre avant la livraison à la couche supérieure. Pour éviter la fragmentation par les routeurs, le protocole IPv6 préconise d'apprendre la taille minimale de paquet supportée sur tout le chemin et ainsi, d'envoyer des paquets de la bonne taille. Les trois champs de l’en-tête dédiés à cette fonction ont donc été supprimés.

Un inconvénient d'IPv4 est qu'il n'y a aucune relation entre les adresses de niveau réseau et de niveau liaison. Or l'adresse physique est nécessaire pour transmettre la trame qui contient le paquet. Avec IPv4, il faut donc chercher et récupérer cette adresse physique avant d'encapsuler le paquet dans la trame. Pour éviter cette recherche, IPv6 fournit l'auto-configuration d'adresse réseau à partir de l'adresse physique.

Le protocole IPv4 ayant été conçu il y a 40 ans, de nouveaux usages sont apparus qu'il a fallu ajouter de manière artificielle. Dans IPv6, il sera possible d'ajouter de nouvelles fonctionnalités assez facilement grâce aux extensions d'en-tête.

De IPv4 à IPv6

Une transition pas si simple

IPv4 et IPv6 sont des protocoles différents : les adresses ainsi que le format des paquets n'ont pas la même structure. De fait, les deux technologies vont cohabiter sur Internet, chacune dans un plan d'adressage différent. Ceci a pour conséquence que la communication entre un hôte IPv4 et un hôte IPv6 ne peut pas se faire directement. Pour connecter tous les utilisateurs de manière transparente, les routeurs et les hôtes devront avoir une connectivité IPv4 et IPv6. On parle de double pile. Les équipements disposent alors à la fois d'une adresse IPv4 et d'une adresse IPv6.

File:04-fig.png
Figure 2 : Transition IPv6 en double pile.


Lorsqu'une des connectivités est manquante, il est possible de recourir à des solution de tunnels. Un tunnel permet à deux hôtes IPv4 de communiquer au travers d'un réseau IPv6, ou inversement. Cependant, il faut noter que le recours à un mécanisme de tunnels est complexe et nuit aux performances.

D'autres scénarios de transition ont été étudiés et sont spécifiés dans plusieurs RFC.

Une cohabitation forcée

Le premier standard IPv6 date de 1995 et a été amélioré et complété durant une dizaine d'années. Depuis, la transition vers IPv6 n'est toujours pas finie alors même que les opérateurs ont quasiment tous épuisé leurs adresses IPv4.

En France, dans son baromètre annuel de la transition vers IPv6, l'ARCEP pointe les nombreux freins au déploiement généralisé d'IPV6. Les causes sont multiples car cette transition nécessite des compétences techniques et des ressources adaptées. C'est un vrai projet. Et ce rapport met en évidence le rôle joué dans cette transition par les multiples acteurs de l'Internet : fournisseurs d'accès, hébergeurs de contenus, opérateurs mobiles, équipementiers, services DNS, réseau de transit et terminaux.

Cette figure, tirée de ce rapport, montre bien l'état d'avancement de la transition IPV6 au niveau des différents acteurs de l'Internet.

File:04-fig.png
Figure 3 : Etat de la transition vers IPv6 selon les acteurs [ARCEP].

Les équipementiers (ou fabricants de routeurs), les systèmes d'exploitation et les terminaux ont achevé leur mise en conformité avec les standards d'IPv6. Pour d'autres acteurs, comme les opérateurs, l'adoption d'IPv6 est plus longue. Carton rouge aux hébergeurs dont l'adoption d'IPv6 reste encore assez faible.

Sur le plan international, la situation est aussi différente selon les pays. Les Etats-unis, le Canada et quelques pays d'Europe ont largement déployé IPv6. Cependant, en majorité, les pays sont encore très faiblement impliqués.

File:04-fig.png
Figure 4 : Carte de l'adoption d'IPv6 par CISCO.


En 2015, l'usage d'IPv6 vu par les serveurs de Google est proche de 7 %. La figure 3 montre l'évolution des usages[1]. Cette courbe montre un doublement de l'adoption d'IPv6 tous les ans depuis 2010. Les utilisateurs de Google peuvent émettre des requêtes en IPv6 s'ils ont un accès IPv6 offert par leur fournisseur d'accès à Internet. En aout 2016, aux USA, IPv6 représente plus de la moitié du trafic mobile vers Facebook[2].

Figure 3 : Évolution du pourcentage de requêtes reçues en IPv6 par Google.

La figure 4[3] montre le pourcentage des organisations annonçant un préfixe IPv6. L'Europe, de manière générale, est active dans le déploiement d'IPv6 et la Belgique en particulier [4]. Pour suivre l'évolution de l'adoption d'IPv6, la page web de world ipv6 launch référence les mesures faites par différents opérateurs[5].


Figure 4 : Évolution du pourcentage d'organisations annonçant au moins un préfixe IPv6 par région.

IPv6 : un passage obligé

Restons optimistes cependant car les nouveaux services ou les nouveaux usages se tournent de plus en plus vers IPv6 car ils ne trouvent pas dans IPv4 les solutions techniques nécessaires à leur développement.

Les distributeurs de contenus qui déploient une infrastructure de caches répartis sur tout l'Internet ont besoin de beaucoup de flexibilité, de beaucoup de bande passante et d'une latence faible. Les nouveaux réseaux d'accès sont de plus en plus en IPv6. Enfin, l'Internet des objets, les villes intelligentes ou les réseaux de véhicules ne peuvent se développer qu'en IPv6.

L'adoption d'IPv6 est aussi une question de formation. Le protocole IPv6 n'est plus au stade expérimental ; il est indispensable pour un fonctionnement normal de l'Internet. Nous entendons par "normal", un fonctionnement respectant les principes fondateurs de l'Internet, dont celui du "bout-en-bout". Si les principes de ces deux versions d'IP sont très similaires, IPv4 adopte de plus en plus des principes non conventionnels pour continuer à fonctionner.

L'apprentissage du fonctionnement de l'Internet doit se faire de nos jours principalement avec IPv6, et accessoirement avec IPv4. Il faut rendre banale la nouvelle version du protocole IP. Dans un article[6], Geof Huston dresse une liste de fausses assertions et de rumeurs pour justifier de ne pas commencer le travail de migration vers IPv6. Si ces fausses assertions circulent, elles démontrent à quel point le besoin de formation et d'information sur la situation de l'Internet est nécessaire. Nous espérons que ce cours contribuera à combler ce manque.

Conclusion

Pour conclure, l'heure de la pénurie d'adresses IPv4 a sonné depuis quelques années et IPv6 est un passage obligé pour développer les nouveaux usages et simplifier le fonctionnement du réseau. IPv6 est le protocole de l’Internet du 21e siècle. Il est incontournable. L'IoT (Internet of Things) et les nouveaux usages seront les moteurs de son déploiement massif dans les dix prochaines années. Comme il modernise effectivement IPv4, il nécessite une étude approfondie de ses mécanismes de fonctionnement pour faciliter son appropriation par l'ensemble des acteurs impliqués dans un monde de plus en plus numérique.

IPv6 permet de retrouver les principes qui ont fait le succès de l'Internet comme, notamment, une connectivité simplifiée. Il est admis aujourd'hui qu'IPv6 est indispensable pour le développement des services innovants.
  1. Google. Statistics. IPv6 Adoption
  2. Col P. (2016) ZDNet. IPv6 représente plus de la moitié du trafic mobile vers Facebook aux USA
  3. RIPE NCC. IPv6 Enabled Networks
  4. Cole, P. (2016). ZDnet. La Belgique championne du monde d'IPv6, bien loin devant la France !
  5. World IPv6 Launch IPv6 Measurements
  6. Huston, G. (2011). Cisco Internet Protocol Journal, Vol. 14, No. 1, pp. 14-21, March. Transitional Myths
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