Difference between revisions of "MOOC:Compagnon Act11-s7"

From Livre IPv6

(Fonctions d'une adresse réseau)
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== Introduction à l'adressage ==
 
== Introduction à l'adressage ==
 
 
Le format et la représentation des adresses sont les éléments
 
Le format et la représentation des adresses sont les éléments
 
les plus directement visibles de la nouvelle version du protocole,
 
les plus directement visibles de la nouvelle version du protocole,
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== Fonctions d'une adresse réseau ==
 
== Fonctions d'une adresse réseau ==
 
 
Dans une architecture IP, une adresse sert en fait à deux
 
Dans une architecture IP, une adresse sert en fait à deux
 
fonctions distinctes :
 
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* L'identification : une adresse de niveau réseau identifie de manière unique la machine parmi les « N » machines du réseau, « N » pouvant être arbitrairement grand, dans l'Internet par exemple. L'identification permet à deux interlocuteurs de se reconnaître pendant un connexion. Cette vérification est mise en oeuvre dans les pseudo entêtes d'une connexion TCP ou dans les associations de sécurité IPSec.
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* L'identification : une adresse de niveau réseau identifie de manière unique la machine parmi les « N » machines du réseau, « N » pouvant être arbitrairement grand, dans l'Internet par exemple. L'identification permet à deux interlocuteurs de se reconnaître pendant une connexion. Cette vérification est mise en oeuvre dans les pseudo entêtes d'une connexion TCP ou dans les associations de sécurité IPSec.
 
* La localisation : elle est utilisée pour décider de la remise directe ou de la recherche d'un intermédiaire qui saura délivrer les datagrammes, selon le principe du routage en "saut par saut". En fait, elle ne varie qu'en cas de changement de prestataire IP ou de réorganisation de site. La localisation est découpée en deux parties : localisation globale, identifiant le réseau, et localisation locale, distinguant les machines sur un même réseau. Ces deux niveaux de localisation ont une influence déterminante dans la structuration du format des adresses, que nous verrons ultérieurement.
 
* La localisation : elle est utilisée pour décider de la remise directe ou de la recherche d'un intermédiaire qui saura délivrer les datagrammes, selon le principe du routage en "saut par saut". En fait, elle ne varie qu'en cas de changement de prestataire IP ou de réorganisation de site. La localisation est découpée en deux parties : localisation globale, identifiant le réseau, et localisation locale, distinguant les machines sur un même réseau. Ces deux niveaux de localisation ont une influence déterminante dans la structuration du format des adresses, que nous verrons ultérieurement.
 
   
 
   
Lors des études initiales IPv6, il avait été envisagé de
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Lors des études initiales d'IPv6, il avait été envisagé de
 
séparer les deux fonctions pour faciliter la résolution des
 
séparer les deux fonctions pour faciliter la résolution des
 
problèmes liés à la renumérotation, la mobilité ou la
 
problèmes liés à la renumérotation, la mobilité ou la
 
multi-domiciliation. Pour l'instant, la séparation des fonctions est
 
multi-domiciliation. Pour l'instant, la séparation des fonctions est
encore à l'état de recherche<ref> Bortzmeyer, S. (2009)[http://www.bortzmeyer.org/lisp-wg  Création du groupe de travail IETF sur LISP.]</ref>, et les premiers plans d'adressage IPv6 continuent, comme en IPv4, à lier les deux fonctions. De même, comme en IPv4, on considérera qu'une adresse est associée à une interface. Une machine peut posséder plusieurs interfaces. De même, une interface peut supporter plusieurs adresses.
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encore à l'état de recherche<ref> Bortzmeyer, S. (2009) [http://www.bortzmeyer.org/lisp-wg  Création du groupe de travail IETF sur LISP.]</ref>, et les premiers plans d'adressage IPv6 continuent, comme en IPv4, à lier les deux fonctions. De même, comme en IPv4, on considérera qu'une adresse est associée à une interface. Une machine peut posséder plusieurs interfaces. De même, une interface peut supporter plusieurs adresses.
  
 
== Question de taille ==
 
== Question de taille ==
 
 
Une adresse IPv6 est un mot de 128 bits (16 octets). Cette taille
 
Une adresse IPv6 est un mot de 128 bits (16 octets). Cette taille
 
de 128 bits semble techniquement bien adaptée aux mots manipulés
 
de 128 bits semble techniquement bien adaptée aux mots manipulés
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version précédente d'IP, de la longueur binaire de l'adresse fait
 
version précédente d'IP, de la longueur binaire de l'adresse fait
 
apparaître l'adressage IPv6 comme plus &quot;ardu&quot;. Cette
 
apparaître l'adressage IPv6 comme plus &quot;ardu&quot;. Cette
complexité n'est qu' apparente, elle traduit la nécessaire
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complexité n'est qu'apparente. Elle traduit la nécessaire
 
adaptation au changement, pour laquelle la plupart d'entre nous
 
adaptation au changement, pour laquelle la plupart d'entre nous
montrons naturellement une réticence initiale. Certes la
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montrons naturellement une réticence initiale. Certes, la
 
représentation des adresses de 16 octets a nécessité l'abandon de
 
représentation des adresses de 16 octets a nécessité l'abandon de
 
la notation décimale pointée pour une nouvelle notation
 
la notation décimale pointée pour une nouvelle notation
hexadécimale (cf séquence suivante), qui est un compromis
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hexadécimale (cf. activité suivante), qui est un compromis
 
raisonnable pour la manipulation des adresses par les administrateurs
 
raisonnable pour la manipulation des adresses par les administrateurs
réseau. Pour le commun des utilisateurs l'auto-configuration et la
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"réseau". Pour le commun des utilisateurs, l'auto-configuration et la
 
banalisation des services de nommage (DNS Domain Name Service) et des
 
banalisation des services de nommage (DNS Domain Name Service) et des
annuaires réseaux suppléeront, comme pour IPV4, la nécessité
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annuaires "réseaux" suppléeront, comme pour IPV4, la nécessité
 
d'avoir à manipuler directement les adresses.
 
d'avoir à manipuler directement les adresses.
  
 
Les principes de structuration de cet adressage dérivent des
 
Les principes de structuration de cet adressage dérivent des
 
techniques déjà utilisées en IPv4, à savoir une classification de
 
techniques déjà utilisées en IPv4, à savoir une classification de
divers plans d'adressage sur les parties hautes de l'adresse (c'est à
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divers plans d'adressage sur les parties hautes de l'adresse (c'est-à-dire sur les préfixes les plus courts), associée à une agrégation
dire sur les préfixes les plus courts), associée à une agrégation
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des tables de routage, généralisant la méthode dite CIDR (Classless
des tables de routage généralisant la méthode dite CIDR (Classless
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Inter Domain Routing). L'usage de divers masques de
Inter Domain Routing) dans laquelle l'usage de divers masques de
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taille « élastique » permet d'une part, une certaine souplesse dans
taille « élastique » permet une certaine souplesse dans
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la définition et l'attribution des préfixes, une optimisation de
 
la définition et l'attribution des préfixes, une optimisation de
 
l'espace d'adressage limitant le gaspillage des larges portions
 
l'espace d'adressage limitant le gaspillage des larges portions
d'adresses, comparativement à IPv4, ainsi qu'une optimisation du
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d'adresses, comparativement à IPv4 ; et d'autre part, une optimisation du
routage en facilitant sa hiérarchisation (les équipements des
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routage en facilitant sa hiérarchisation : les équipements des
 
opérateurs de coeur de l'internet prennent leur décision de routage
 
opérateurs de coeur de l'internet prennent leur décision de routage
sur des préfixes courts, les « grandes directions »,
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sur des préfixes courts, les « grandes directions ». Les équipements de routage des opérateurs de distribution, en périphérie du réseau, routent sur des préfixes plus longs, ce qui a pour effet de contenir la taille des tables de
alors que les équipements de routage des opérateurs de
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routage de cœur du réseau dans des proportions raisonnables.
distribution, en périphérie du réseau, routent sur des préfixes
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plus longs, ce qui a pour effet de contenir la taille des tables de
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routage de cœur du
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réseau dans des proportions raisonnables.
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Toutefois, en IPv4, l'amélioration induite par CIDR semble
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Toutefois, en IPv4, l'amélioration induite par CIDR semble limitée du fait des adresses de 32 bits trop courtes pour permettre une bonne structuration, et du fait qu'il faut assumer le coût du passé : les adresses ont été allouées sans préoccupation d'organisation d'ordre hiérarchique ou géographique. Malgré ces
limitée du fait que les adresses de 32 bits sont trop courtes pour
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limitations, l'adressage IPv6 s'appuie de facto sur CIDR. La gestion des tables de routage, dans le cœur du réseau, s'en trouvera quand même améliorée car :
permettre une bonne structuration et qu'il faut assumer le coût du
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passé les adresses ont été allouées sans préoccupation
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d'organisation d'ordre hiérarchique ou géographique. Malgré ces
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limitations l'adressage IPv6 s'appuie de facto sur CIDR. La gestion
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des tables de routage, dans le cœur du réseau s'en trouvera quand
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même améliorée car :
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* dès le début le plan d'adressage est hiérarchisé, éliminant les longs préfixes,
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* dès le début, le plan d'adressage est hiérarchisé, éliminant les longs préfixes ;
* les sites multi-domiciliés posséderont autant d'adresses que de fournisseurs de service,
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* les sites multi-domiciliés posséderont autant d'adresses que de fournisseurs de service ;
* des mécanismes de renumérotation automatique faciliteront le changement de préfixes, lors du changement de fournisseur d'accès ou de basculement sur un nouveau plan d'adressage.
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* des mécanismes de renumérotation automatique faciliteront le changement de préfixes lors du changement de fournisseur d'accès, ou de basculement sur un nouveau plan d'adressage.
 
   
 
   
 
Le nombre de combinaisons possibles sur 128 bits (2 à la
 
Le nombre de combinaisons possibles sur 128 bits (2 à la
puissance 128) est &quot;astronomique&quot;, il dépasse les 3.4 x 10
+
puissance 128) est &quot;astronomique&quot;. Il dépasse les 3,4 x 10
puissance 38:
+
puissance 38 :
*340 milliards de milliards de milliards de milliards
+
* 340 milliards de milliards de milliards de milliards
*Précisément : 340 282 366 920 938 463 463 374 607 431 701 211 156  
+
* Précisément : 340 282 366 920 938 463 463 374 607 431 701 211 156  
 
Certaines estimations encadrent le nombre d'adresses
 
Certaines estimations encadrent le nombre d'adresses
disponibles par mètre carré de la surface terrestre, océans
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disponibles par mètre carré de surface terrestre, océans
compris, entre 1 564 et 3 911 873 538 269 506 102 adresses au m2.
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compris, entre 1 564 et 3 911 873 538 269 506 102.
 
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1 564 &lt; @ au mètre carré océans compris &lt; 3
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1 564 &lt; @ au mètre carré, océans compris &lt; 3
 
911 873 538 269 506 102
 
911 873 538 269 506 102
 
   
 
   
[[Image:activite-11-adressage-img01-735x330-v20151013-01.jpg|600px|center|thumb| Figure 1: Estimation de densité des adresses IPv6 par mètre carré de surface terrestre]]
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[[Image:activite-11-adressage-img01-735x330-v20151013-01.jpg|600px|center|thumb| Figure 1 : Estimation de la densité des adresses IPv6 par mètre carré de surface terrestre.]]
 
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Une citation de Jean Michel Cornu tente de nous en donner une représentation palpable: Si on recouvrait la surface de la terre d’une couche de sable de 50 km d’épaisseur (jusqu’en haut de la stratosphère), et que l’on attribue une adresse IPv6 à chaque grain de sable, on n’utiliserait qu’environ deux cent milliardième des adresses disponibles.
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Une citation de Jean Michel Cornu tente de nous en donner une représentation palpable : si on recouvrait la surface de la terre d’une couche de sable de 50 km d’épaisseur (jusqu’en haut de la stratosphère), et que l’on attribue une adresse IPv6 à chaque grain de sable, on n’utiliserait qu’environ deux cent milliardièmes des adresses disponibles.
 
<ref>  
 
<ref>  
Cornu, Jean-Michel (2001) AFING: Fondation Internet Nouvelle Génération <br>[http://www.cornu.eu.org/texts/ipv6-et-adressage#exemple_ce_que_represente_le_nombre_d_adresses_ipv6 Ce que représent ele nombre d'adresse IPv6]</ref>
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Cornu, Jean-Michel (2001) AFING: Fondation Internet Nouvelle Génération <br>[http://cornu.viabloga.com/texts/ipv6-et-adressage#exemple_ce_que_represente_le_nombre_d_adresses_ipv6]</ref>
  
 
Sans tomber dans l'optimisme béat de ces grandeurs, ni le pessimisme primitif
 
Sans tomber dans l'optimisme béat de ces grandeurs, ni le pessimisme primitif
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les années 1960) les 4 milliards d'adresses possibles d'IPv4 (2
 
les années 1960) les 4 milliards d'adresses possibles d'IPv4 (2
 
puissance 32) paraissaient également une limite matériellement
 
puissance 32) paraissaient également une limite matériellement
inaccessible ; force est de constater que l'adressage IPv6 est
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inaccessible, force est de constater que l'adressage IPv6 est
 
largement dimensionné et qu'une organisation raisonnée de cet
 
largement dimensionné et qu'une organisation raisonnée de cet
 
espace devrait lui offrir une certaine pérennité. Il est toutefois
 
espace devrait lui offrir une certaine pérennité. Il est toutefois
 
difficile de prévoir l'utilisation des adresses dans le futur.
 
difficile de prévoir l'utilisation des adresses dans le futur.
 
Ainsi, par exemple, le plan d'adressage actuellement mis en oeuvre
 
Ainsi, par exemple, le plan d'adressage actuellement mis en oeuvre
utilise un identifiant d'équipement de 64 bits, c'est à dire la
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utilise un identifiant d'équipement de 64 bits, c'est-à-dire la
moitié de la taille de l'adresse. En fait ce genre de calcul n'est
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moitié de la taille de l'adresse. En fait, ce genre de calcul n'est
 
qu'un argument pour justifier l'usage de préfixes d'adresses de
 
qu'un argument pour justifier l'usage de préfixes d'adresses de
 
taille fixe, qui simplifie le traitement de l'en-tête des
 
taille fixe, qui simplifie le traitement de l'en-tête des
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== Durée de vie d'une adresse ==
 
== Durée de vie d'une adresse ==
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IPv6 généralisant le plan d'adressage CIDR, les préfixes restent dans tous les cas la propriété des opérateurs. Il ne peuvent plus être attribués "à vie" aux équipements. Les adresses IPv6 sont donc "prêtées" aux interfaces des équipements. L'attribution d'une adresse à une interface est faite temporairement. La durée du prêt (quelque fois appelée durée de vie : ''lifetime'') associée à l'adresse, indique la durée pendant laquelle l'interface est dépositaire de l'adresse. Quand la durée de vie est épuisée, l'adresse devient invalide. Elle est supprimée de l'interface et devient potentiellement assignable à une autre interface. Une adresse invalide ne doit jamais être utilisée comme adresse dans des communications. La valeur par défaut de la durée de vie d'une adresse est de 30 jours, mais cette durée peut être prolongée, voire portée à l'infinie (valeur réservée avec tous bits à 1). L'adresse "lien-local" a une durée de vie illimitée.
IPv6 généralisant le plan d'adressage CIDR, les préfixes
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restent dans tous les cas la propriété des opérateurs. Il ne
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peuvent plus être attribués &quot;à vie&quot; aux équipements.
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Les adresses IPv6 sont donc « prêtées » aux interfaces
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des équipements. L'attribution d'une adresse à une interface est
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faite temporairement. Une durée de vie est associée à l'adresse
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qui indique le temps pendant lequel l'interface est dépositaire de l'adresse. Cela facilite la renumérotation des machines. Quand la
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durée de vie est épuisée, l'adresse devient invalide, elle est
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supprimée de l'interface et devient potentiellement assignable à
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une autre interface. Une adresse invalide ne doit jamais être
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utilisée comme adresse de communication. La valeur par défaut est
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de 30 jours, mais cette durée peut être étendue, voire portée à
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l'infinie (valeur réservée tous bits à 1). L'adresse lien-local a
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une durée de vie illimitée.
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La renumérotation de l'interface d'un équipement consiste à
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Ce système de prêt d'adresse vise à faciliter la renumérotation. La renumérotation de l'interface d'un équipement consiste à passer d'une adresse à une autre. Lors de cette opération, il n'est pas souhaitable de changer brusquement d'adresse. Sinon, toutes les connexions TCP en cours, qui utilisent l'adresse comme identificateur de connexion, seraient brutalement coupées. Ceci pourrait entraîner des perturbations importantes au niveau des applications utilisant TCP à ce moment-là.  
passer d'une adresse à une autre. Lors de cette opération, il n'est
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pas souhaitable de changer brusquement d'adresse, sinon toutes les
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connexions TCP en cours, qui l'utilisent comme identificateur,
+
seraient brutalement coupées. Ceci pourrait entraîner des
+
perturbations applicatives. Pour faciliter cette transition, un
+
mécanisme d'obsolescence est mis en place pour invalider
+
progressivement une adresse. Ce mécanisme s'appuie sur la capacité
+
d'affectation de plusieurs adresses valides à une même interface.
+
Un état est associé à chaque adresse. Il intervient dans la
+
sélection de l'adresse à utiliser. Cet état indique dans quelle
+
phase de sa durée de vie une adresse se situe vis à vis de
+
l'interface. Une première phase consiste à vérifier l'unicité de
+
l'adresse sur le lien à l'aide de l'algorithme de détection de
+
duplication (''Duplicate Address Detection''). En cas de succès de
+
l'algorithme, l'adresse est effectivement allouée à l'interface.
+
Durant cette phase de test l'adresse ne peut être utilisée pour
+
communiquer (cf découverte des voisins).
+
  
Après l'allocation de l'adresse à l'interface, le premier des
+
Pour faciliter cette transition, un mécanisme d'obsolescence est mis en place pour invalider progressivement une adresse. Ce mécanisme s'appuie sur la capacité d'affectation de plusieurs adresses valides à une même interface.
états est qualifié de préféré : l'utilisation de l'adresse n'est
+
Pour effectuer le choix de l'adresse à utiliser, un état est associé à chaque adresse. Cet état indique dans quelle phase de sa durée de vie une adresse se situe vis-à-vis de l'interface. La figure 2 représente les différents états que prend une adresse depuis sa création. En voici la description.
alors pas restreinte. Peu avant sont invalidation l'adresse passe
+
dans un état dit déprécié. Son utilisation est déconseillée
+
mais pas interdite. Elle ne doit plus être utilisée comme adresse
+
source pour de nouvelles communications (établissement de connexions
+
TCP par exemple). Par contre elle peut encore servir d'adresse source
+
pour les connexions existantes. Les datagrammes reçus à une adresse
+
dépréciées continuent à être remis normalement. A la durée de
+
validité, il est également associé une durée de son état
+
préféré.
+
  
<center>[[Image:activite-11-adressage-img02-740x315-v20151009-01.jpg|600px|center|thumb|Figure 2: Etats successifs d'une adresse.]]
+
* Le premier de ces états est qualifié de provisoire (''tentative''). L'adresse a été créée par l'auto-configuration mais son unicité sur le lien n'a pas encore été réalisée. Tant que l'adresse est dans l'état provisoire, elle ne peut être utilisée pour communiquer.
 +
* Une fois que l'unicité a été vérifiée par une procédure dédiée, l'adresse devient valide(''valid''). Elle est effectivement allouée à l'interface. <br>
 +
* Après l'allocation de l'adresse à l'interface, le premier des états valides est qualifié de préféré (''preferred''). L'utilisation de l'adresse n'est aucunement restreinte.
 +
* Peu avant son invalidation, l'adresse passe dans un second état valide dit déprécié (''deprecated''). Son utilisation est déconseillée, mais pas interdite. L'adresse ne doit plus être utilisée comme adresse source pour de nouvelles communications (établissement de connexions TCP par exemple). Par contre, elle peut encore servir d'adresse source pour les connexions existantes. Les datagrammes reçus à une adresse dépréciée continuent à être remis normalement. À la durée de validité, il est également associé une durée de son état préféré.
 +
* Quand l'adresse atteint l'état invalide (''invalid''), elle ne doit plus être utilisée du tout. Le délai du prêt est expiré.
 +
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 +
[[Image:A11-fig2b.jpg|400px|center|thumb|Figure 2 : États successifs d'une adresse sur une interface.]]
 
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== Conclusion ==
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L'adresse est un élément essentiel dans un réseau de communication. L'adresse se doit d'être unique. Elle identifie un nœud dans le réseau. Dans le cas de l'Internet, elle a une fonction supplémentaire, elle sert à le localiser. L'adresse est un nombre codé en binaire. Le nombre de bits utilisés pour le codage de ce nombre détermine le nombre maximum d'adresses disponibles. L'adresse utilisée en IPv4 comportait 32 bits. En IPv6, ce nombre a été passé à 128 bits soit une taille 4 fois plus grande pour le codage. L'espace d'adressage a ainsi grandi d'une magnitude de 10 puissance 30.
 +
D'autres aspects vont être développés dans les prochaines activités, notamment :
 +
* la notation des adresses IPv6 ;
 +
* les différents types d'adresses ;
 +
* l'utilisation des adresses.
  
 
== Références bibliographiques ==
 
== Références bibliographiques ==
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== Pour aller plus loin==
 
== Pour aller plus loin==
Le lecteur intéressé par l'état des travaux sur la séparation des fonctions d'identification et de localisation des adresses, pourra consulter les références suivantes :
+
Le lecteur intéressé par l'état des travaux sur la séparation des fonctions d'identification et de localisation des adresses pourra consulter les références suivantes :
 
* Bortzmeyer, S. [http://www.bortzmeyer.org/separation-identificateur-localisateur.html Séparation de l'identificateur et du localisateur dans Internet]  
 
* Bortzmeyer, S. [http://www.bortzmeyer.org/separation-identificateur-localisateur.html Séparation de l'identificateur et du localisateur dans Internet]  
 
* Meyer, D. (2008). Cisco Internet Protocol Journal, Vol. 11, No. 1. <br>The Locator Identifier Separation Protocol (LISP).
 
* Meyer, D. (2008). Cisco Internet Protocol Journal, Vol. 11, No. 1. <br>The Locator Identifier Separation Protocol (LISP).
 
* RFC 7215 Locator/Identifier Separation Protocol (LISP) Network Element Deployment Considerations ([http://www.bortzmeyer.org/7215.html analyse])
 
* RFC 7215 Locator/Identifier Separation Protocol (LISP) Network Element Deployment Considerations ([http://www.bortzmeyer.org/7215.html analyse])
* Gurtov, A. and Komu, M. (2009). Internet Protocol Journal, Vol. 12, No. 1. <br>[http://www.cisco.com/web/about/ac123/ac147/archived_issues/ipj_12-1/121_host.html Host Identity Protocol: Identifier/Locator Split for Host Mobility and Multihoming].
+
* Gurtov, A. and Komu, M. (2009). Internet Protocol Journal, Vol. 12, No. 1. page 27<br>[http://ipj.dreamhosters.com/wp-content/uploads/issues/2009/ipj12-1.pdf Host Identity Protocol: Identifier/Locator Split for Host Mobility and Multihoming].

Revision as of 22:39, 9 June 2019


Activité 11  : Qu'est ce qu'une adresse IP ?

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Introduction à l'adressage

Le format et la représentation des adresses sont les éléments les plus directement visibles de la nouvelle version du protocole, pour l'utilisateur et l'administrateur réseau. La pénurie des adresses IPv4 étant le premier élément qui a motivé la création d'une nouvelle version du protocole, la définition du nouveau format d'adressage a conditionné certains choix techniques pour IPv6. Bien que les principes de base soient dérivés de ceux employés en IPv4, cet adressage apparaît de prime abord plus complexe. Il est important de se familiariser avec les règles et les principes de représentation et d'attribution avant d'aborder le nouveau protocole.

Fonctions d'une adresse réseau

Dans une architecture IP, une adresse sert en fait à deux fonctions distinctes :

  • L'identification : une adresse de niveau réseau identifie de manière unique la machine parmi les « N » machines du réseau, « N » pouvant être arbitrairement grand, dans l'Internet par exemple. L'identification permet à deux interlocuteurs de se reconnaître pendant une connexion. Cette vérification est mise en oeuvre dans les pseudo entêtes d'une connexion TCP ou dans les associations de sécurité IPSec.
  • La localisation : elle est utilisée pour décider de la remise directe ou de la recherche d'un intermédiaire qui saura délivrer les datagrammes, selon le principe du routage en "saut par saut". En fait, elle ne varie qu'en cas de changement de prestataire IP ou de réorganisation de site. La localisation est découpée en deux parties : localisation globale, identifiant le réseau, et localisation locale, distinguant les machines sur un même réseau. Ces deux niveaux de localisation ont une influence déterminante dans la structuration du format des adresses, que nous verrons ultérieurement.

Lors des études initiales d'IPv6, il avait été envisagé de séparer les deux fonctions pour faciliter la résolution des problèmes liés à la renumérotation, la mobilité ou la multi-domiciliation. Pour l'instant, la séparation des fonctions est encore à l'état de recherche[1], et les premiers plans d'adressage IPv6 continuent, comme en IPv4, à lier les deux fonctions. De même, comme en IPv4, on considérera qu'une adresse est associée à une interface. Une machine peut posséder plusieurs interfaces. De même, une interface peut supporter plusieurs adresses.

Question de taille

Une adresse IPv6 est un mot de 128 bits (16 octets). Cette taille de 128 bits semble techniquement bien adaptée aux mots manipulés par les processeurs d'aujourd'hui. Les processeurs 32 bits et 64 bits sont aujourd'hui banalisés. Le quadruplement, comparativement à la version précédente d'IP, de la longueur binaire de l'adresse fait apparaître l'adressage IPv6 comme plus "ardu". Cette complexité n'est qu'apparente. Elle traduit la nécessaire adaptation au changement, pour laquelle la plupart d'entre nous montrons naturellement une réticence initiale. Certes, la représentation des adresses de 16 octets a nécessité l'abandon de la notation décimale pointée pour une nouvelle notation hexadécimale (cf. activité suivante), qui est un compromis raisonnable pour la manipulation des adresses par les administrateurs "réseau". Pour le commun des utilisateurs, l'auto-configuration et la banalisation des services de nommage (DNS Domain Name Service) et des annuaires "réseaux" suppléeront, comme pour IPV4, la nécessité d'avoir à manipuler directement les adresses.

Les principes de structuration de cet adressage dérivent des techniques déjà utilisées en IPv4, à savoir une classification de divers plans d'adressage sur les parties hautes de l'adresse (c'est-à-dire sur les préfixes les plus courts), associée à une agrégation des tables de routage, généralisant la méthode dite CIDR (Classless Inter Domain Routing). L'usage de divers masques de taille « élastique » permet d'une part, une certaine souplesse dans la définition et l'attribution des préfixes, une optimisation de l'espace d'adressage limitant le gaspillage des larges portions d'adresses, comparativement à IPv4 ; et d'autre part, une optimisation du routage en facilitant sa hiérarchisation : les équipements des opérateurs de coeur de l'internet prennent leur décision de routage sur des préfixes courts, les « grandes directions ». Les équipements de routage des opérateurs de distribution, en périphérie du réseau, routent sur des préfixes plus longs, ce qui a pour effet de contenir la taille des tables de routage de cœur du réseau dans des proportions raisonnables.

Toutefois, en IPv4, l'amélioration induite par CIDR semble limitée du fait des adresses de 32 bits trop courtes pour permettre une bonne structuration, et du fait qu'il faut assumer le coût du passé : les adresses ont été allouées sans préoccupation d'organisation d'ordre hiérarchique ou géographique. Malgré ces limitations, l'adressage IPv6 s'appuie de facto sur CIDR. La gestion des tables de routage, dans le cœur du réseau, s'en trouvera quand même améliorée car :

  • dès le début, le plan d'adressage est hiérarchisé, éliminant les longs préfixes ;
  • les sites multi-domiciliés posséderont autant d'adresses que de fournisseurs de service ;
  • des mécanismes de renumérotation automatique faciliteront le changement de préfixes lors du changement de fournisseur d'accès, ou de basculement sur un nouveau plan d'adressage.

Le nombre de combinaisons possibles sur 128 bits (2 à la puissance 128) est "astronomique". Il dépasse les 3,4 x 10 puissance 38 :

  • 340 milliards de milliards de milliards de milliards
  • Précisément : 340 282 366 920 938 463 463 374 607 431 701 211 156

Certaines estimations encadrent le nombre d'adresses disponibles par mètre carré de surface terrestre, océans compris, entre 1 564 et 3 911 873 538 269 506 102.

1 564 < @ au mètre carré, océans compris < 3 911 873 538 269 506 102

Figure 1 : Estimation de la densité des adresses IPv6 par mètre carré de surface terrestre.

Une citation de Jean Michel Cornu tente de nous en donner une représentation palpable : si on recouvrait la surface de la terre d’une couche de sable de 50 km d’épaisseur (jusqu’en haut de la stratosphère), et que l’on attribue une adresse IPv6 à chaque grain de sable, on n’utiliserait qu’environ deux cent milliardièmes des adresses disponibles. [2]

Sans tomber dans l'optimisme béat de ces grandeurs, ni le pessimisme primitif rappelant qu'au début d'Arpanet (réseau ancêtre d'internet dans les années 1960) les 4 milliards d'adresses possibles d'IPv4 (2 puissance 32) paraissaient également une limite matériellement inaccessible, force est de constater que l'adressage IPv6 est largement dimensionné et qu'une organisation raisonnée de cet espace devrait lui offrir une certaine pérennité. Il est toutefois difficile de prévoir l'utilisation des adresses dans le futur. Ainsi, par exemple, le plan d'adressage actuellement mis en oeuvre utilise un identifiant d'équipement de 64 bits, c'est-à-dire la moitié de la taille de l'adresse. En fait, ce genre de calcul n'est qu'un argument pour justifier l'usage de préfixes d'adresses de taille fixe, qui simplifie le traitement de l'en-tête des datagrammes.

Durée de vie d'une adresse

IPv6 généralisant le plan d'adressage CIDR, les préfixes restent dans tous les cas la propriété des opérateurs. Il ne peuvent plus être attribués "à vie" aux équipements. Les adresses IPv6 sont donc "prêtées" aux interfaces des équipements. L'attribution d'une adresse à une interface est faite temporairement. La durée du prêt (quelque fois appelée durée de vie : lifetime) associée à l'adresse, indique la durée pendant laquelle l'interface est dépositaire de l'adresse. Quand la durée de vie est épuisée, l'adresse devient invalide. Elle est supprimée de l'interface et devient potentiellement assignable à une autre interface. Une adresse invalide ne doit jamais être utilisée comme adresse dans des communications. La valeur par défaut de la durée de vie d'une adresse est de 30 jours, mais cette durée peut être prolongée, voire portée à l'infinie (valeur réservée avec tous bits à 1). L'adresse "lien-local" a une durée de vie illimitée.

Ce système de prêt d'adresse vise à faciliter la renumérotation. La renumérotation de l'interface d'un équipement consiste à passer d'une adresse à une autre. Lors de cette opération, il n'est pas souhaitable de changer brusquement d'adresse. Sinon, toutes les connexions TCP en cours, qui utilisent l'adresse comme identificateur de connexion, seraient brutalement coupées. Ceci pourrait entraîner des perturbations importantes au niveau des applications utilisant TCP à ce moment-là.

Pour faciliter cette transition, un mécanisme d'obsolescence est mis en place pour invalider progressivement une adresse. Ce mécanisme s'appuie sur la capacité d'affectation de plusieurs adresses valides à une même interface. Pour effectuer le choix de l'adresse à utiliser, un état est associé à chaque adresse. Cet état indique dans quelle phase de sa durée de vie une adresse se situe vis-à-vis de l'interface. La figure 2 représente les différents états que prend une adresse depuis sa création. En voici la description.

  • Le premier de ces états est qualifié de provisoire (tentative). L'adresse a été créée par l'auto-configuration mais son unicité sur le lien n'a pas encore été réalisée. Tant que l'adresse est dans l'état provisoire, elle ne peut être utilisée pour communiquer.
  • Une fois que l'unicité a été vérifiée par une procédure dédiée, l'adresse devient valide(valid). Elle est effectivement allouée à l'interface.
  • Après l'allocation de l'adresse à l'interface, le premier des états valides est qualifié de préféré (preferred). L'utilisation de l'adresse n'est aucunement restreinte.
  • Peu avant son invalidation, l'adresse passe dans un second état valide dit déprécié (deprecated). Son utilisation est déconseillée, mais pas interdite. L'adresse ne doit plus être utilisée comme adresse source pour de nouvelles communications (établissement de connexions TCP par exemple). Par contre, elle peut encore servir d'adresse source pour les connexions existantes. Les datagrammes reçus à une adresse dépréciée continuent à être remis normalement. À la durée de validité, il est également associé une durée de son état préféré.
  • Quand l'adresse atteint l'état invalide (invalid), elle ne doit plus être utilisée du tout. Le délai du prêt est expiré.
Figure 2 : États successifs d'une adresse sur une interface.

Conclusion

L'adresse est un élément essentiel dans un réseau de communication. L'adresse se doit d'être unique. Elle identifie un nœud dans le réseau. Dans le cas de l'Internet, elle a une fonction supplémentaire, elle sert à le localiser. L'adresse est un nombre codé en binaire. Le nombre de bits utilisés pour le codage de ce nombre détermine le nombre maximum d'adresses disponibles. L'adresse utilisée en IPv4 comportait 32 bits. En IPv6, ce nombre a été passé à 128 bits soit une taille 4 fois plus grande pour le codage. L'espace d'adressage a ainsi grandi d'une magnitude de 10 puissance 30. D'autres aspects vont être développés dans les prochaines activités, notamment :

  • la notation des adresses IPv6 ;
  • les différents types d'adresses ;
  • l'utilisation des adresses.

Références bibliographiques

  1. Bortzmeyer, S. (2009) Création du groupe de travail IETF sur LISP.
  2. Cornu, Jean-Michel (2001) AFING: Fondation Internet Nouvelle Génération
    [1]

Pour aller plus loin

Le lecteur intéressé par l'état des travaux sur la séparation des fonctions d'identification et de localisation des adresses pourra consulter les références suivantes :

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